L’ancien président tunisien Zine el Abidine Ben Ali est décédé. Il était né le 3 septembre 1936. Des trois dirigeants du Maghreb, le président Ben Ali aura sans doute été le plus exécré par son peuple. Même ceux qui profitaient du système qu’il avait instauré le détestaient. Il a accédé au pouvoir, le 7 novembre 1987 après son prédécesseur Habib Bourguiba. Il aura tenu vingt-trois ans au pouvoir, mais sera tombé en moins d’un mois. De Zine El-Abidine Ben Ali, les Tunisiens garderont sans doute le souvenir de sa dernière apparition télévisée, le 13 janvier 2011.
Tout au long de sa carrière, Ben Ali va faire preuve d’habileté. De 1958 à 1974, il est nommé directeur de la sécurité militaire. Après l’échec de l’union tuniso-libyenne auquel il est soupçonné d’avoir été mêlé, il est envoyé en exil comme attaché militaire à Rabat, au Maroc. Il revient trois ans plus tard à Tunis, à la direction de la sûreté. C’est sans état d’âme qu’il mate des manifestations, en janvier 1978.
Nouvel exil en avril 1980 : sous la pression de Wassila Bourguiba, l’épouse du vieux président, il est écarté de son poste de directeur de la sûreté. Pour arriver à ses fins, le militaire devenu policier va agiter l’épouvantail islamiste. Devenu ministre de l’intérieur en 1986, il déclare à ses collègues interloqués, lors du premier conseil des ministres auquel il participe : « Dans notre lutte contre les islamistes, nous devons recourir à deux méthodes : la désinformation et les délinquants. Nous allons les sortir de prison pour leur confier des tâches de police. » Le système Ben Ali est né. Il ne fera que se renforcer au fil du temps, jusqu’à rendre l’atmosphère irrespirable.
Ben Ali est alors envoyé à Varsovie comme ambassadeur. Quatre ans plus tard, il est rappelé à Tunis. Les « émeutes du pain » viennent de se produire. On a besoin de cet homme d’ordre. En octobre 1984, il est nommé secrétaire d’Etat à la sécurité nationale. C’est à partir de ce moment que Ben Ali tisse sa toile sur le pays.
Lorsqu’il est arrivé au pouvoir, Ben Ali a promis des réformes, la démocratie, les droits des femmes et l’éducation. Mais l’effusion de sang dans l’Algérie voisine lui a fait craindre les islamistes et s’il a empêché la contagion du carnage algérien de se propager de l’autre côté de la frontière, il n’a pas réussi à créer une société plus ouverte. Il a bien apporté la croissance économique à la Tunisie, mais le tournant de son pouvoir a été la mort de Mohamed Bouazizi – un jeune homme qui ne pouvait pas être plus éloigné de la vie des Ben Ali. Cette affaire a déclenché des manifestations de rue qui ont finalement conduit à sa chute, qui a surpris presque tout le monde lorsqu’il a pris un avion à destination de l’Arabie Saoudite.